Réforme de la procédure de contrôle URSSAF et du recouvrement contentieux des cotisations
Aux termes d’un Décret du 8 juillet 2016 (n° 2016-941), la procédure de contrôle URSSAF et le recouvrement contentieux des cotisations sociales sont modifiés.
L’objectif affiché est de renforcer les droits des entreprises contrôlées, ainsi que leurs garanties.
Si ce décret ne comporte pas de grand bouleversement dans l’architecture générale des contrôles URSSAF, il comporte des encadrements supplémentaires. En somme, la matière est précisée sur certains points, voire encadrée que ce soit pour l’administration ou les entreprises contrôlées.
Etant ici précisé que les dispositions du décret sont, pour la plupart, entrées en vigueur depuis le 11 juillet dernier. Elles sont donc d’ores et déjà applicables aux entreprises contrôlées.
S’agissant du Régime général de Sécurité Sociale, les principales modifications de la procédure de contrôle et du recouvrement sont les suivantes :
- Phase préalable : l’Avis de contrôle
L’Avis prévenant l’entreprise du contrôle est bien sûr maintenu. Il est toutefois désormais adressé minimum 15 jours avant la date de première visite de l’Agent de contrôle, sauf en matière de recherche d’éventuelles infractions à l’interdiction de travail dissimulé. Si, en pratique, l’URSSAF maintenait un délai de prévenance, celui-ci n’était pas fixé et cette disposition permettra donc aux entreprises contrôlées de mieux s’organiser.
Le décret confirme que, sauf disposition contraire de l’avis, celui-ci concerne tous les établissements de l’entreprise contrôlée. En revanche, si l’avis énumère les établissements contrôlés, il ne vaudra que pour ces établissements, ce qui vient donc mettre un terme à la jurisprudence contraire sur ce point, ce qui constitue une bonne nouvelle puisque cette mention pouvait, en l’état, être trompeuse sur l’étendue du contrôle.
- Les opérations de contrôle à proprement parlé :
Le contrôle est habituellement effectué sur place, mais le décret relève le seuil au deçà duquel il peut s’agir d’un contrôle sur pièces (entreprises occupant moins de 11 salariés, contre 9 auparavant).
Lors du contrôle, l’entreprise est toujours tenue de mettre à disposition tout document réclamé par l’Agent de contrôle et de permettre l’accès à tout support d’information. Toutefois, l’agent de contrôle aura désormais la possibilité d’exiger que ces documents lui soient présentés selon un classement précis qu’il déterminera.
Lorsque les documents sont dématérialisés, l’agent peut également procéder aux opérations de contrôle aux moyens de traitements automatisés, avec les moyens informatiques de l’entreprise. L’entreprise contrôlée a toutefois la possibilité de s’y opposer dans un délai de 15 jours.
Enfin, les modalités de contrôle par échantillonnage et extrapolation sont précisées.
En tout état de cause, les opérations de contrôle ne peuvent pas excéder 3 mois.
- Lettre d’observation et phase d’échanges :
A l’issue du contrôle, la lettre d’observation adressée à l’entreprise contrôlée devra être motivée par chef de redressement (notamment en droit et en fait, mais également en reprenant les assiettes, mode de calcul, montant des cotisations et des éventuelles pénalités)
Comme auparavant, la personne contrôlée peut répondre à cette lettre d’observations. Si cette réponse est circonstanciée et adressée dans le délai imparti (30 jours), l’agent chargé du contrôle devra à son tour lui répondre de manière motivée.
- Phase de redressement :
A l’issue de la phase d’échanges, il est le cas échant procédé à la mise en recouvrement des cotisations, majorations et pénalités.
Le décret codifie tout d’abord les solutions dégagées par la Cour de cassation concernant l’absence d’observation lors d’un précédent contrôle. Il était déjà établi que l’URSSAF ne pouvait pas notifier un redressement sur des éléments qui avaient déjà fait l’objet d’un précédent contrôle et qui n’avaient pas fait l’objet d’observation. La jurisprudence avait précisé que ce principe était subordonné à deux conditions : l’organisme s’était prononcé en toute connaissance de cause, et les circonstances de droit et de fait n’avaient pas changées. Le décret intègre ces deux conditions qui auront désormais une origine légale.
Il est également précisé que la personne contrôlée peut se prévaloir d’une circulaire ou d’une instruction régulièrement publiée mais que sa demande est recevable dès lors que les sommes mises en recouvrement n’ont pas un caractère définitif. Ce moyen de défense devra donc être invoqué avec rapidité pour être opposable à l’URSSAF.
- Phase de recouvrement contentieux
Cette phase ne connaît pas de grande modification, et conserve son schéma actuel (mise en demeure puis saisine de la commission de recours amiable, ou éventuelle contrainte, et contestation devant le Tribunal des Affaires de Sécurité sociale).
Principalement, à compter du 1er janvier 2017, le contenu des mises en demeure sera plus précis, le délai de saisine de la Commission de recours amiable sera porté à deux mois, la décision de la commission de recours amiable devra être détaillée par motif de redressement et préciser les délais et voies de recours.
Par ailleurs, en cas d’opposition à contrainte, si ce recours est jugé abusif ou dilatoire, le cotisant est condamné à une amende civile dont le montant est fixé à 6% des sommes dues, avec un minimum de 150 €.
Rappelons enfin sur ce point que, si la compétence du TASS est à ce jour maintenue, le projet de réforme liée à la justice du 21ème siècle propose d’attribuer au tribunal de grande instance certaines compétences du tribunal des affaires de sécurité sociale.
Le décret s’intéresse également aux majorations et pénalités de retard, notamment en assouplissant les conditions dans lesquelles une remise peut être obtenue puisque la personne contrôlée n’aura plus à justifier de sa bonne foi si les conditions d’une remise automatique ne sont pas réunies (sauf travail dissimulé qui reste une exception à cette disposition).
Enfin, de façon plus anecdotique, le décret prévoit qu’à compter du 1er janvier 2017, la chartre du cotisant (qui est en général jointe à l’avis de contrôle initial) deviendra opposable à l’URSSAF, ce qui tout de même paraît équitable s’agissant d’un document émanant de l’organisme contrôleur...