Indemnisation du seul préjudice prouvé
La Cour de Cassation vient, notamment dans trois arrêts, de modifier une jurisprudence qui semblait bien établie, à savoir le manquement à une règle de droit créant ipso facto une réparation nécessaire au bénéfice du salarié.
Faisant une application des règles du droit civil, la Cour de Cassation estime que le salarié ne peut prétendre à une réparation, que s’il justifie d’un préjudice distinct.
Dans une première espèce jugée le 13 avril 2016, la Cour de Cassation refuse l’indemnisation à un salarié qui sollicitait des dommages et intérêts pour remise tardive de documents de fin de contrat.
La Cour rappelle – ce qui était déjà acquis – que les documents de fin de contrat sont quérables et non portables.
Mais allant plus loin, la Cour de Cassation fait grief au salarié de ne pas apporter la preuve d’un préjudice distinct, rejetant ainsi l’idée d’un préjudice nécessairement causé et donc indemnisable.
Dans une seconde espèce, la Cour de Cassation, le 3 mai 2016, rejette la demande de dommages et intérêts présentée par un salarié, qui se plaignait d’une violation conventionnelle à l’occasion du renouvellement d’un contrat saisonnier.
En l’espèce, le salarié rappelait qu’aux termes de la convention collective, il aurait dû faire l’objet d’un entretien avec possibilité de se faire assister par un conseiller.
La Cour ne suit pas le raisonnement du salarié, rappelant qu’il ne suffit pas d’invoquer la violation d’une garantie dans le cas d’absence de proposition d’un nouveau contrat saisonnier.
Encore faut-il démontrer la réalité d’un préjudice.
Dans une troisième espèce rendue le 25 mai 2016, la Cour de Cassation retient que le salarié ne peut réclamer l’indemnisation du fait de l’illicéité de la clause de non concurrence, que s’il justifie d’un préjudice distinct et démontré.
Ces arrêts marquent une rupture forte en revenant à une plus grande orthodoxie juridique s’agissant des préjudices souvent allégués mais non prouvés.
Probablement influenceront ils les pratiques qui consistaient à former de très nombreuses demandes sans justifier, pour chaque indemnisation réclamée, d’un préjudice réel.
Rappelons en effet que le droit français ne connaît pas des dommages et intérêts punitifs, mais seulement de l’indemnisation d’un préjudice prouvé et dont le lien de causalité avec la faute alléguée (et prouvée) est établi.